Thief (2014 – Ps3, Xbox 360, Ps4, Xbox One, PC)

A la fois reboot et quatrième volet de la saga du voleur, Thief remet au goût du jour l’infiltration et la rocambole nocturne. A nous la Cité, ville steampunk pur jus de rouille, véritable dédale de ruelles sombres et crasseuses. A nous toutes les aptitudes et autres gadgets du cambrioleur avec entre autres le cache-cache dans l’ombre, les flèches-grappins et le crochetage bien classe. Malgré une ambiance géniale et des qualités évidentes, la critique professionnelle s’en est donné à cœur joie pour étriper ce Thief, lui reprochant en chœur son dirigisme, l’architecture morcelée de la ville ou l’I.A défaillante (??).

Si on peut pinailler sur l’histoire prétexte, le jeu offre énormément de possibilités. La ville, divinement tarabiscotée, nous oblige enfin à observer pour repérer tous ses recoins. Et j’ai rarement vu une I.A aussi réactive. On reproche aux gardes d’être parfois aveugles, mais on critique là le concept même de la série : si le voleur noir reste immobile dans les ténèbres, l’obscurité le rend invisible.

Vu que les combats sont souvent mortels, le jeu nous oblige à la plus impérieuse des discrétions. Parfait, c’est la définition même du genre : l’infiltration.

Braid (2008 – Xbox 360, Ps3, PC)

Tim, un Mario en costume cravate doit sauver sa Princesse. Pas sûr que cette fois-ci, la Princesse le suive… L’univers a beau être féerique (Mama mia, ces belles couleurs partout !), avec des constats désenchantés sur la vie à deux, l‘histoire m‘a parue bien triste… et même assez ambiguë sur la fin. Autre faux semblant, Braid n’est effectivement pas un jeu de plates-formes « classique ».

S‘il emprunte des éléments à Mario, c‘est pour mieux les détourner l‘instant d‘après. La possibilité de « rembobiner » la partie, de jouer avec le temps dans tous les sens (de le stopper comme de le ralentir) offre d’énormes possibilités. Or qui dit plein de possibilités dit aussi énigmes bien tordues (du genre tordu de chez tordu). En pièce d’orfèvre magique (le jeu est beau) et délicate (le jeu est court), Braid s’apprécie à sa juste valeur sans soluce.

S’apercevoir après tant d’efforts que l’impensable était possible est vraiment un plaisir immense !

Another World (1991 – Amiga, Atari ST, Megadrive, Mega CD, Super Nintendo, 3DO, Jaguar, PC…)

Chef d’œuvre d’un seul homme, Eric Chahi, Another World est un jeu immersif. Par son ambiance particulière mais aussi par ces fameuses cinématiques intégrées à l’action. Avec cette mise en scène en direct, le jeu se rapproche côté émotions du cinéma. Il n’y a qu’à voir ce gros plan effrayant de l’énorme félin noir au début du jeu, un gros plan qui marque durablement le joueur !

Quant aux graphismes, on est vraiment dans un autre monde ! L’utilisation des polygones 2D offre un rendu exceptionnel autant du côté esthétique (les décors d’une froide étrangeté sont magnifiques) que de l’animation (la fluidité des mouvements égale celle d’un Prince of Persia). Côté jeu, ce mélange d’action et d’énigmes est très difficile et ne se livre vraiment qu’avec le temps, les occasions de mourir étant légions et imprévisibles.

Du coup, les gamers en manque d’action pure lui préféreront certainement Flashback. Ce jeu réutilise avec efficacité les mêmes procédés techniques (cinématiques, polygones 2D…) mais n’a pas la dimension artistique qui rend cet Another World si émouvant.

Fable: the Lost Chapters (2005 – Xbox, PC)

Fable: the Lost Chapters est un jeu que j’ai fini plusieurs fois : une fois avec un Paladin des plus bons avec une auréole sur la tête, une fois avec un archer maléfique adepte de la débauche et du meurtre gratuit, et une autre fois avec un magicien neutre bien barbu et bien alcoolique aussi. A chaque fois le même plaisir, jubilatoire plaisir de façonner à sa guise la personnalité du héros, de le voir peu à peu vieillir, être marqué par les cicatrices des batailles, de l’habiller, de le tatouer ou d’acheter des maisons pour ensuite les décorer (« Esprit de Sims, es-tu là ? »).

On peut être acclamé par les enfants ou effrayer les paysans, fonder un heureux ménage ou visiter à l’occasion le Bordel de Darkwood. Mais attention, devenir un héros n’est pas de tout repos. Fable – The Lost Chapters n’oublie pas d’aligner les petites quêtes et les énormes boss. L’aventure se rallonge même par rapport à l’original, avec à la clé un gigantesque Dragon à affronter.

Fable: the Lost Chapters est bourré de charme et s’avère être le meilleur épisode de la série. Il y a un équilibre parfait entre l’aventure et la gestion.

Assassin’s Creed Origins (2017 – Ps4, Xbox One, PC)

Après deux années de repos bien méritées, la série des AC prend un nouvel envol avec Origins. Ici, il est question des origines de la Confrérie. On découvre l’Égypte Antique, immense, et Bayek, protecteur des Pharaons, qui souhaite se venger en tuant un à un les membres d’un ordre secret. La formule connue, mélange d’infiltration et d’action, est ici magnifiée. En lorgnant sur Witcher III, AC s’est transformé en un véritable RPG avec des quêtes variées qui s’enchaînent à la perfection, un inventaire complet et un levelling débridé.

La carte est juste extraordinaire : à la fois gigantesque et vivante, offrant de splendides panoramas. Il y a tant à faire. On pourra s’infiltrer dans une garnison avec Senu, l’aigle qui nous assiste pour débusquer les ennemis ou chasser les crocros et les hippopos sur les bords du Nil. On pourra cavaler sur les dunes pour dénicher un repaire de brigands, descendre dans un sombre tombeau pour y découvrir de merveilleux trésors ou bien escalader une Pyramide pour le vertige que cela procure.

Soutenu par une histoire bourrée de surprises et de rencontres, il y a tant à découvrir, tellement d’heures de jeu devant soi qu’on ne peut que s’incliner.

Abzû (2016 – Ps4, Xbox One, PC)

Quand on a goûté aux mers de sable, difficile de ne pas voir en Abzû le prolongement de Journey (2012). Emporté par le score d’Austin Wintory, il faudra toujours aller de l’avant mais cette fois-ci, en plongeant à corps perdu dans les profondeurs d’un océan. Ici, les environnements aquatiques sont somptueux et s’animent d’une vie bariolée avec ces bancs de poisson multicolores filant à toute vitesse. On croisera jusque dans les abysses de débonnaires mammifères marins aux tailles imposantes.

Flâner permet d’observer cette vie qui s’organise, de découvrir des formes inédites : c’est là la différence avec Journey. On peut y jouer sans s’arrêter, filer droit au but, et ne pas s’apercevoir de la magie qui nous entoure. Abzû a cette belle naïveté de croire que le joueur n’est pas qu’un joueur. Qu’il va s’arrêter un instant, tantôt pour contempler, juste pour contempler, tantôt pour virevolter en s’accrochant à des créatures marines pour d’éphémères ballets.

Styx: Shards of Darkness (2017 – Ps4, Xbox One, PC)

Gobelin à la langue bien pendue, Styx a pour honorable métier de voler tout ce qui brille (en mettant s’il le faut des petits coups de couteaux dans le dos). C’est par hasard que j’ai découvert ce second volet mettant en scène ce lutin vert, n’ayant jamais entendu parler du premier opus auparavant. Et je découvre un jeu d’infiltration sans concession. Comme le gobelin est nul en combat, pour espérer survivre, il faudra être le plus possible indécelable dans des décors gigantesques.

La difficulté est redoutable mais le jeu est malin. Il nous permet d’être libre et créatif pour tromper les gardes, en abusant pourquoi pas des pouvoirs spéciaux (invocation d’un clone entre autres). Quelques défauts : l’histoire est prétexte, les graphismes oscillent entre de magnifiques panoramas et des intérieurs moyens. Certains passages sont ahurissants de difficulté, sauvegarder compulsivement tous les deux mètres peut finir par agacer. Mais en bon jeu teigneux, Styx a ce côté « poil à gratter » qui fait qu’on ne l’oublie pas.

Et le gobelin est attachant jusque dans sa manière de se mouvoir, en bon prince des voleurs, et dans sa manière de se foutre royalement de nous lors des game over.

Inside (2016 – Ps4, Xbox One, Pc)

Petit garçon qui avance dans un monde de plus en plus inquiétant… La filiation avec Limbo est plus qu’évidente et cette fois-ci, Playdead a ajouté de la couleur, des teintes souvent glaçantes, et de la profondeur de champ avec une 3D nous offrant de vastes panoramas immobiles. Tout comme Limbo, le reste est une soustraction permanente : pas d’explication, pas de musique (ou si peu) et surtout, pas de scène réconfortante.

Comme ce gamin au pull rouge, on plonge dans un cauchemar parfaitement orchestré où les énigmes, elles-mêmes en jouant sur un timing serré ou sur des actions malaisantes (tirez donc sur la queue du cochon), nous mettent dans un inconfort certain. La séquence finale, bien glauque, perturbe autant qu’elle fascine, et résume pour ma part ce qu’est Inside.

Alors que Limbo était une perle horrifique jouant sur des peurs classiques (l’arachnophobie pour n’en citer qu’une), Inside réhabilite « l’étrange » comme un genre primordial du fantastique, à même de nous captiver et de nous surprendre.

Assassin’s Creed Syndicate (2015 – Ps4, Xbox One, PC)

Les insolents jumeaux et assassins, Jacob et Evie Frye, décident de leurs propres chefs de mettre le boxon à Londres. Avec ses cheminées crachant leurs fumées au loin et le fog qui nimbe Big Ben et la Tamise, le Londres de l’époque Victorienne est parfaitement reconstitué. On s’y croirait. Côté background, le jeu lorgne du coté de « Gangs of New York » avec ces bandes rivales qui s’affrontent à coups de hachoir. Mater l’adversaire pour libérer les quartiers est une bonne idée, d’autant que les bastons de rue et les séquences d’infiltrations sont très réussies. Mais dommage que ces missions aient une forte tendance à se répéter.

Côtés nouveautés, tous les ajouts sont amusants même si on peut leur reprocher de ne pas être crédibles pour un sou. Le grappin nous permet de faire de la tyrolienne entre deux bâtiments sur une bonne centaine de mètres (!) et les calèches, à fond les ballons, détruisent tout sur leurs passages comme de véritables chars d’assaut.

Neuvième de la série, Syndicate est au final un jeu bien fun avec une pléthore de choses à faire. Reste que je ne peux pas m’empêcher de comparer et de lui préférer les épisodes précédents (et suivants), plus sobres et plus subtils à mon goût.

The Witcher 3: Wild Hunt (2015 – Ps4, Xbox One, PC)

Le monde est en guerre mais Geralt le Sorceleur a d’autres préoccupations : il est à la recherche de Ciri, sa fille adoptive. Une horde de cavaliers fantômes, la terrible Chasse Sauvage, est également de sortie… Au risque de perdre ce qui faisait la singularité de la série, The Witcher III s’est mis au diapason avec Skyrim. Le monde du Sorceleur est désormais ouvert avec des Royaumes gigantesques à parcourir. Cette liberté est bienvenue d’autant que les pays visités, balayés par les vents, sont très jolis.

Mais ce qui fait avant tout l’excellence de cet épisode, c’est d’avoir su lier de vastes zones à une narration dense et captivante, spécifique à la série. Basé sur les romans d’Andrzej Sapkowski, The Witcher III nous offre des histoires remarquablement bien écrites, mettant en valeur le moindre des PNJ du jeu. Le bien et le mal se confondent en permanence et les choix cruciaux et moraux abondent. Petit à petit et sans mot dire, j’ai été littéralement happé par cet univers.

A noter le Gwynt, un mini-jeu à la Magic the gathering : des cartes à jouer et à collectionner sans fin. Un petit jeu génial dans un immense RPG !

extensions :

The Witcher 3: Wild Hunt – Hearts of Stone

Le troisième volet du Sorceleur fut une aventure « hors-du-commun », dépassant toutes mes attentes de joueur. Après une centaine d’heures de jeu et le couperet du générique de fin, je n’avais qu’une hâte : prolonger l’expérience avec les extensions. Hearts of Stone est la première d’entre elles et nous offre une quête principale, indépendante à celle du jeu de base ainsi qu’une nouvelle zone à parcourir, Velen s’agrandissant de manière conséquente au nord-est. L’extension s’adresse aux joueurs aguerris avec des ennemis de haut niveau et des boss bien coriaces. Insuffler du challenge est une très bonne chose car j’ai repris goût à la victoire comme aux premiers instants.

Alors certes le pays de Velen, même agrandi, reste le pays que l’on connaît, avec ses champs et ses forêts et il est difficile d’être dépaysé (laissons ce soin à l’extension suivante). Mais entre le Roi Crapaud, de vieilles connaissances et un Enchanteur venu d’Orient, les rencontres en tous genres abondent, tout comme les quêtes et les rebondissements (imprévisibles).

Une réussite !

The Witcher 3: Wild Hunt – Blood and Wine

A la demande de preux chevaliers errants, notre sorceleur voyagera jusqu’au duché de Toussaint, un pays ensoleillé, un cadre idyllique rappelant l’Italie. L’endroit idéal, pense-t-on, pour y couler des jours paisibles… Loin des terres désolées de Velen, cette extension nous offre rien de moins qu’un nouveau, vaste et magnifique bac à sable et la promesse d’une quarantaine d’heures de jeu (comptez-en 20 pour la quête principale) ! Diantre, ce n’est plus une extension là, c’est un jeu à part entière !

On joue goulûment, passant d’un tournoi hautement chevaleresque à la rénovation de notre domaine viticole, sans oublier les découpages en règle de scolopendres géants et de plantes carnivores dans les vignobles. Les amateurs de Gwynt (le jeu de cartes) ont même de quoi faire avec une toute nouvelle faction à jouer et un grand tournoi de maîtres à remporter. Même si le côté sombre de la série perdure dans la trame principale, même si les monstres sont sacrément balaises, c’est le caractère enjoué qui prend le dessus dans cet ultime chapitre du jeu.

Un humour rafraîchissant pour un jeu qu’on aimerait sans fin.